Visite de l’église de Saint Salvy, guidée par Monsieur de Saint Salvy – mai 2013
« Cette paroisse était sur ce qu’on appelle le Montmoure ; c’est un nom qui a disparu maintenant mais l’espace s’étend au lieu dit Les Sabos au Pech, en Aribaut et même derrière. Au Montmoure, il y avait cette chapelle dédiée à St Salvy.
Fiac et la commune ne se sont plus jamais occupés de cette église. Mes grand parents n’ont pas voulu la laisser à l’abandon, du fait de la présence des tombes familiales.
Fiac qui est très étendu avait donc 3 églises : St Salvy ici, St Pierre à Brazis et St Ferréol au village.
De quand date cette église ? On ne peut pas savoir. L’inscription de 1718 marque une réfection et un agrandissement. Une chapelle existait depuis au moins le XVIème puisqu’elle est mentionnée par des documents de cette époque.
Après la révolution, les gens de Fiac ont dit « il faudrait à Fiac une église plus grande ». La vieille église de Fiac, qui était une petite église, a alors été remplacée par l’actuelle ; St Salvy a été fermée (on n’a pas mis de curé) et il restait encore, je crois, un curé à Brazis.
En 1820, les gens d’ici ont fait une pétition pour que l’on retrouve un vicaire qui dépendrait de Fiac car à l’époque il y avait une maison pour le prêtre. La pétition est allée au préfet et à l’évêque car il fallait avoir l’avis des deux. Ça a été un peu difficile, il y a eu un peu de bagarre mais finalement, ils nous ont accordé un curé, un vicaire à condition que les paroissiens le fassent vivre, le logent, l’entretiennent, car la paroisse de Fiac ne pouvait pas entretenir un deuxième prêtre. Les paroissiens ont été d’accord et ça a marché pendant quelques années, puis les signataires ont un peu oublié tout ça. C’est à dire qu’un jour, mon grand père de l’époque s’est retrouvé tout seul à payer le curé. Il s’est mis en colère et il a dit : « puisque c’est ça, je vais fermer le cimetière ! » et il en a muré l’entrée. Puis cela c’est arrangé et il y a eu un vicaire qui est resté jusqu’avant la guerre de 14.
C’est pour ça que l’on a l’impression que cette église est une chapelle de château mais pas du tout. D’ailleurs vous avez des tombes des gens du pays qui restent. Nous on se met de part et d’autre de l’entrée , on envahit un peu tout puisque hélas on meurt beaucoup ! Toutefois, il y a beaucoup de tombes de fiacois qui ont été transférées au cimetière de Fiac et d’autres sont restées.
Cette église a été construite en plusieurs fois, avec des pierres de toute la région. Vous avez de la très belle pierre blanche des carrières du Prône à St Martin. Ces grandes pierres blanches, elles ne bougent pas, c’est de la pierre solide. C’est de la pierre merveilleuse. Par contre, il y a des grès gris, dont tout le monde s’est servi dans le pays. C’est du grès local qui n’est pas très solide et qui a tendance à s’écraser un peu.
De la pierre rose, a été utilisée pour construire le château. Elle est très jolie par sa couleur mais elle a un défaut, elle gèle l’hiver : l’eau rentre et cela éclate. C’est une pierre qui ne tient pas beaucoup.
Dans les années 1950, petit à petit, de gros problèmes sont apparus. Le clocher a menacé de s’effondrer. Mon père l’a fait raser au niveau du toit et il l’a fait reconstruire droit. Une partie du porche a été refaite en 1964 parce que tout l’angle s’était complètement effondré. Ensuite, il y a eu d’autres problèmes : la charpente, la toiture, avaient leur temps. Et en 2005, tout a été complètement refait. Par ailleurs, on ne peut installer de gouttière car c’est interdit mais l’ennui c’est que l’eau s’infiltre et le sol se ravine. Je voudrais que l’on amène 1 tonne ou 2 de gravât ciment pour recharger un peu cette zone problématique. Vous voyez que ce pilier-là penche car il n’est plus très bien soutenu et en penchant il a entraîné la petite chapelle et sa voûte.
En 2012, on a « attaqué » l’intérieur en abandonnant l’idée de refaire les plâtres car ils entretenaient une humidité épouvantable dans l’église. Les meubles, c’est à dire les boiseries qui faisaient le tour du cœur, étaient en très mauvais état et ne tenaient plus qu’avec la cire et la lasure, le bois était devenu pulvérulent. Un jour, il y avait une messe avec des scouts et ceux qui servaient la messe sont passés à travers les sièges du cœur. Il a fallu prendre une décision. On a décidé d’enlever les plâtres, de faire respirer cette chapelle. Peut-être qu’un jour on remettra un enduit mais je trouve que c’est très bien comme ça, ça respire.
Et on en a profité pour construire un nouvel autel, face au public et un banc pour le prêtre, modernes. Je n’ai pas voulu faire de copie car on doit faire des meubles un peu modernes en 2013.
Pour ce qui est des vieux meubles, je n’ai gardé que ça (voir photo). Cela correspond au dossier du siège du curé et c’est pour montrer dans quel état c’était. A l’arrière, cela ressemble à de l’éponge.
Ça tenait parce que tous les ans, ma mère, mes cousines, ma sœur, nous allions passer de la lasure sur les meubles qui tenaient ainsi avec les multiples couches.
Je l’ai mis là car ça occupe bien ce trou mais tout le reste était totalement décati.
Il y a des objets qui restent que je garde au château pour éviter qu’on ne les vole. Je les ai, ils sont à la disposition de la population. Il n’y en a pas beaucoup : deux calices, un ostensoir.. mais ce qui est surtout très dommage, c’est que beaucoup d’entre eux ont été donnés petit à petit à la paroisse de Fiac.
En plus Fiac a récupéré une des cloches qui avait été donnée par mon arrière grand père en souvenir de sa femme, morte à 40 ans, et cette cloche s’appelle « Cécile ». Comme elle était un peu fendue et donnait un mauvais son, elle a été recoulée dans les années 70 et on a gardé l’inscription qu’il y avait en souvenir de Cécile. Donc à Fiac celle que vous entendez, c’est « Cécile ». Il y avait une deuxième cloche ici, qui s’appelait «Justine» du nom d’une de mes ancêtres lointaines et cette cloche-ci est partie à St Martin. Ce n’est pas très gentil qu’elles soient parties, car elles avaient le nom de mes ancêtres. Mais je pense qu’à l’époque où cela s’est passé, mon aïeul s’en moquait un peu, il a laissé faire.
Des choix de rénovation ont été faits dans cette église mais il y encore beaucoup de choses à faire.
A l’intérieur, à droite, la petite chapelle est particulièrement jolie parce qu’elle est voûtée. C’est une voûte romane que l’on appelle « voûte d’arête ».
L’autel de cette chapelle, du 18ème siècle, est très beau. Il est typique des autels que l’on faisait à cette époque-là avec la forme d’un tombeau et il n’est pas du tout pareil que le maître autel, qui a été offert par un de mes grand pères en 1865. Il s’était entiché de faire un maître-autel plus beau, mais à notre époque, c’est un goût qu’on n’aime pas beaucoup.
A la place de la croix, il y avait un immense tableau mais il est déposé contre le mur dans la chapelle parce qu’il est très abîmé. Il fallait pouvoir réparer le mur derrière le tableau. Et on ne l’a pas remis en place parce qu’on a pensé qu’il pourrait être restauré avec l’arrivée de quelques subventions.
Pour l’instant, on a fait faire une croix, comme on a fait faire un autel, comme on a fait faire le banc du curé, pour redonner vie à l’ensemble et non transformer l’église en salle polyvalente.
Les chandeliers sont de très beaux chandeliers en métal argenté du 18è siècle, de 1718, date de la reconstruction.
Sur votre gauche, il y avait une chapelle dont je ne connais pas l’histoire. C’est une chapelle qui a été construite après celle de droite et qui a été démolie on ne sait quand, je n’ai aucun document. Elle a dû s’effondrer, elle devait être mal construite et alors on a gardé la voûte en briques alors que dans l’autre, il y a une voûte en pierres et puis on a monté un mur avec de la brique creuse comme l’on fait maintenant. Ce n’est donc pas si vieux que ça, après la guerre de 14 ?
Ce qui est curieux et qui prouve que cette église est beaucoup plus vieille que la date qui est inscrite, c’est que vous allez voir des traces de fenêtres dans les murs que l’on a décapés. En particulier dans la sacristie, au-dessus de la petite porte, on voit bien qu’il y a une petite fenêtre qui a été bouchée. Elle apparaît dans la sacristie mais elle devait s’ouvrir dehors. Par ailleurs, si vous regardez tout en haut de ce même mur, vous verrez une arrivée de tuiles au niveau du toit qui existait avant 1718. C’est une génoise qui date d’avant cette époque-là qu’on a laissée même si ce n’est pas beau car ce sont des preuves d’ancienneté intéressantes à remarquer.
Ainsi, s’ils ont bouché une fenêtre en 1718, cela signifie qu’il y avait un bâtiment avant. Et s’il y avait un bâtiment, il datait de 100 ou 150 ans auparavant. Donc, on peut dire que cette église est peut-être du 15ième ou 16ième siècle.
A droite du maître-autel, dans le mur, vous pouvez voir une « piscine liturgique » : Quand le prêtre nettoyait son calice, il jetait
l’eau qui avait servi dans un petit trou qui existait autrefois et qui allait à l’extérieur. Mais cette pratique a été interdite à partir du concile de Trente qui a décidé de fermer toutes les piscines liturgiques parce que cela entraînait quelques histoires. En effet, on mettait un bassin derrière et des fidèles allaient se tremper les pieds pour se guérir d’un tas de maladies. Alors l’Eglise a décidé d’arrêter ces fumisteries.
A gauche du maître autel, vous voyez des traces qui sont des marques d’anciens placards ou d’anciennes issues.
Tout cela donc, ce sont des signes d’ancienneté.
Ensuite, tout l’intérieur a été plâtré et c’est en enlevant le plâtre que l’on est tombé dessus.
Y a-t-il toujours des messes dans cette église ?
Nous en fait, la famille de St Salvy, quand on se retrouve tous ensemble, mes neveux, mes nièces… on fait une messe. Quelquefois, il y a des troupes de scouts ou de guides, alors les aumôniers font la messe. La dernière, qui a été faite ici, c’était le 14 juillet de l’an dernier (2012), elle a été dite par le curé de Lavaur.
Il faut savoir que pour la commune, l’entretien d’une église, c’est une charge mais c’est aussi du patrimoine. Il faut surtout que nos communes gardent ce patrimoine, c’est une richesse future. Il faut le garder à tout prix.
Pour résumer, si vous regardez dans le périmètre de cette petite église paroissiale, des petits édifices comme cela, il y en a beaucoup dans la vallée de Giroussens : St Cyriaque, Ste Cécile, l’église de Montferrier… Elles sont toutes du même style et ont été construites à peu près toutes en même temps. Elles sont très simples et belles et on pourrait faire un « circuit touristique » de ces petites chapelles, car elles ont un caractère bien à elles, avec leur clocher mur. »
Il y a un beau bénitier de Giroussens ou Puybegon, qui est répertorié par les monuments historiques
L’Association du Patrimoine Fiacois remercie chaleureusement Monsieur de Saint Salvy pour l’accueil éclairé et amical qu’il a réservé à ses membres.
Le texte de cette plaquette est tiré de l’enregistrement effectué lors de la visite de l’église proposée aux Aînés de Fiac, le 23 mai 2013, par Monsieur de Saint Salvy. Photos : D. Caussé